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Les acteurs de bonne foi


Introduction

C'est une pièce de Marivaux (1688-1763), écrite en 1748 donc assez tardivement. L'auteur était issu de la bourgeoisie mais a perdu son argent, c'est pourquoi il fait toujours allusion à l'argent dans ses oeuvres. Cette pièce n'a pas été jouée du vivant de Marivaux et fait partie de ses dernières oeuvres. Elle comporte un seul acte, découpé en 13 scènes et est assez courte.

Sujet: L'action a lieu dans une maison de campagne, chez Mme Argante, une bourgeoise enrichie. Mme Amelin, son amie, est la tante d'Eraste. Ils font partie des valets. Merlin, Lisette, Colette et Blaise font eux partie des valets. Merlin est le valet d'Eraste et doit mettre en place un divertissement à la demande de son maître pour surprendre Mme Argante. On étudie ici 3 scènes sur 13, dont seule la 2nde est complète. Cela constitue un passage assez long. L'intérêt de cette délimitation repose sur le jeu qui existe entre le jeu théâtral et la vraie vie. On est au début de la pièce, dans la scène d'exposition (qui déborde sur la scène 2). Le sujet de la pièce est indiqué et l'impromptu est mis en place par Merlin. Les thèmes qui seront mis en évidence seront le théâtre dans le théâtre donc la préparation de l'impromptu donc une réflexion sur le théâtre, pour savoir où est la frontière entre la vie et le jeu théâtral.

Problématique: Qu'est ce que l'illusion théâtrale? Quand sommes-nous dans le théâtre?

Plan :
I. Les préparatifs de l'impromptu
II. La répétition de l'impromptu
III. Une réflexion sur le théâtre


I. Les préparatifs de l'impromptu

a Structure du passage
Il commence au milieu de la scène 1. La réplique qui précède celle d'Eraste est prononcée par Merlin: «Je n'ai fourni que ce que nous autres beaux esprits appelons le canevas; la simple nature fournira les dialogues, et cette nature-là sera bouffonne». On met en place le sujet de la pièce, mais aussi celui de l'impromptu. Il y a directement une mise en abime. Ce sujet est expliqué durant les scène 1 et 2 et commence à la scène 3, qui est de répéter un impromptu. Merlin va ainsi avoir plusieurs rôles à la fois: le valet, l'acteur, l'auteur et le metteur en scène. Il ne dit pas la même chose à Eraste dans la scène 1 qu'aux valets acteurs dans la scène 2: il dévoile à son maître le sujet de la pièce, qui est secret. En effet, en complicité avec Colette, Merlin veut tester l'attachement et les réactions de leurs compagnons Blaise et Colette. (En dehors de la pièce, Merlin est avec Lisette et Blaise avec Colette). Merlin n'explique donc pas le secret de cet impromptu, il donne juste aux acteurs le plan et quelques consignes, avec un champ lexical technique: ils doivent jouer en suivant leur caractère. Il y a donc en réalité 2 secrets dans cette pièce.

b) Merlin et ses amis
Dans les préparatifs de l'impromptu sont présentés les personnages. La première partie (de la scène 2 à 5) va être consacrée à la comédie des valets. Comme dit précédemment, Merlin a plusieurs rôles, il est le valet d'Eraste et il est payé pour jouer, il ne fait pas ça gratuitement ou pour l'amour de l'art. C'est sa façon de gagner de l'argent (l. 13). C'est lui qui va diriger les autres personnages, qui joueront leur propre rôle et feront donc semblant de faire semblant.
Lisette et Colette sont des servantes rusées, Blaise est un idiot, Merlin est homme à la mode, il a le bon rôle. On présente aussi les caractères, assez semblables pour les femmes: ce sont des coquettes de village, ce qui est une alliance étonnante, plutôt contradictoire. Le sujet de la pièce est expliqué aux lignes 21 à 23; c'est une jeu amoureux avec une inversion, c'est typique chez Marivaux. L'organisation est mise en place mais il y a une part d'improvisation. Le titre de la pièce s'explique puisque chacun va jouer son rôle.


II. La répétition de l'impromptu

a) Une scène de marivaudage
Le marivaudage est fondé sur le langage, c'est un style précieux propre à Marivaux avec un langage nuancé, raffiné et complexe par lequel les personnages jouent avec leurs sentiments amoureux, les cachent ou se les cachent en raison des convenances sociales. Ce marivaudage est à l'oeuvre dans la scène 3, bien que la scène ne soit pas que badinage amoureux, il y a des interruptions. Dans cette scène, Lisette reproche à son fiancé d'être distant et attiré par Colette.
Il y a tout un jeu sur le langage: les répliques sont courtes et fonctionnent par des reprises de mots, sans pour autant être des stichomythies. Ce sont des jeux de mots. Le langage est ordinaire mais les propos sont subtils. Les relations sont tendues entre Lisette et Merlin: le test de Lisette et donc le sujet fonctionnent.
Ce badinage est interrompu à 2 reprises:
- Par Merlin, l. 47, qui passe d'acteur à metteur en scène car Lisette n'utilise pas le bon langage. En tant que coquette de village, elle n'arrive pas à se mettre au niveau des maîtres.
- Par Colette, l. 71, qui en a le droit puisqu'il s'agit ici d'une répétition. En effet, on dit des injures sur elle, qu'elle prend pour vraies. Elle confond théâtre et réalité. Merlin est fâché car les acteurs ne jouent pas comme il faut.

b) Acteurs et spectateurs
Les personnages badinent, Merlin a un discours plus subtil, il parle bien, avec la bonne distance, il est maître de lui et manie parfaitement le badinage. C'est lui le maître du jeu, qui gère l'affaire en tant que metteur en scène, qu'acteur et que personnage, en passant de l'un à l'autre. Il tire toutes les ficelles, c'est la figure du dramaturge. Il représente bien évidemment Marivaux.
Lisette, quant à elle, a des difficultés, elle est trop agressive: «impertinent» (l. 46) ne convient pas. Le marivaudage est donc très subtil. Cependant, Lisette a conscience qu'il repose sur des mots (l. 15-16), qu'il faut parler comme les maîtres. Le théâtre est ainsi une sorte de promotion sociale, et pas uniquement un amusement, comme le pense Eraste.
Blaise et Colette sont pendant ce temps là spectateurs, ils attendent provisoirement, avant d'entrer en scène et de jouer à leur tour. Ils renforcent donc encore l'illusion théâtrale, par cette mise en abime. De plus, on remarque que le passage de spectateurs à acteurs se fait assez facilement.


III. Une réflexion sur le théâtre

La pièce apparaît à la fin d'une carrière de dramaturge très riche, Marivaux a donc bien tout dans l'esprit, ce qui lui permet de mener une réflexion sur le théâtre.

a) Réalité matérielle Le théâtre est un métier, ne comprenant pas seulement celui d'acteur ou comédien, il y a aussi le métier de metteur en scène. Son but est avant tout de faire rire, d'amuser, de surprendre: c'est la comédie. Le théâtre repose sur du travail, des répétitions et de l'argent.

b) Le métier de comédien
Sans spectateur, il n'y a pas de théâtre. Il y a vraiment théâtre dans le théâtre que si il y a des spectateurs. Mais les acteurs sont parfois spectateurs (l. 37, 71)

c) Le rapport entre le jeu et la vie
Les deux dernières répliques («puis je te battre?») montrent que c'est une répétition, on se pose des questions sur les gestes qu'il faut accomplir au théâtre. Marivaux respecte les règles du théâtre classique donc celle de la bienséance, toujours d'actualité. Néanmoins, c'est une pièce où l'on pourrait passer outre. Tandis qu'il serait impossible de donner un coup de poing dans une comédie de bon goût, écrite en vers et plusieurs (5) actes. Les coups de poing sont en revanche permis dans les farces, scènes très courtes avec des coups de bâton ou de poing. Par cette demande, Lisette trahit sa condition sociale. Merlin l'autorise finalement à lui donner UN coup de poing, puisque nous sommes dans un impromptu, il faut jouer selon sa nature.

Le jeu théâtral renvoie à la vie, le rapport entre les deux est ambigu: les valets jouent leur propre rôle: l. 17-18 et l. -1: «la simple nature fournira les dialogues». Cette confusion pose donc des difficultés: Blaise, l. 25 avec un solécisme (faute de syntaxe): «j'allons». C'est le langage des paysans, présent dans les comtes de Maupassant. Cela instaure un registre réaliste, du naturalisme. Colette fait elle aussi une faute de français: «appriander» (l. 31) et a de même du mal puisqu'elle prend les injures de Lisette pour réelles.
En confondant ainsi jeu théâtral et vie, Marivaux revendique la vérité de son théâtre, il répond aux critiques qu'on lui adresse lui reprochant de faire du théâtre artificiel, sans rapport avec la réalité. On a en arrière-plan la question du naturel dans l'esthétique classique. Le passage de la vie au jeu théâtral est aisé, donc les personnes deviennent facilement des acteurs et de bons personnages. Ainsi, les spectateurs passent facilement au rang d'acteurs et réciproquement. Quand on sait l'observer, la vie a toutes les apparences d'une comédie (l. 3 à 5). Ainsi, la comédie déborde sur la vie quotidienne. La notion de héros comique ou tragique disparaît car il devrait y avoir un personnage hors du commun, qui devienne un type. Le personnage du héros doit être sublime et concentrer un certain nombre de caractéristiques.


Conclusion

C'est une scène essentiellement divertissante mais il est tout de même posé des questions sur le fonctionnement et la nature du théâtre, notamment concernant le rapport entre le théâtre et le réel. Ici, le théâtre représente le réel et Marivaux suggère que l'on peut facilement passer d'acteur à spectateur. (En réalité, ça n'est pas aussi simple que l'auteur le décrit)